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Stéphanie Baur-Kaeser 

les livres et les mômes

Dans presque pile deux semaines – du 6 au 8 octobre 2023 – aura lieu la 2e édition du festival du livre jeunesse de Rue, « Les mots clés à molette ». Coup de projecteur sur la créatrice de ce tout jeune événement destiné au jeune public, mais pas seulement.

Quand on lui demande ce qu’elle voulait faire lorsqu’elle était plus jeune, sa réponse est : « tout sauf prof. Je voulais être fleuriste à la base, » rit-elle, avant de s’expliquer. « Après le bac, j’ai trouvé un boulot d’étudiante pour l’association vaudoise des parents de personnes en situation de handicap mental (AVPHM), pour laquelle je faisais du baby-sitting spécialisé à domicile ». Une première rencontre a lieu : « j’ai découvert une passion. C’est dès ce moment-là que je me suis dit : c’est avec ces mômes-là que je veux bosser. »

La deuxième rencontre a lieu quelques années plus tard, lors d’une formation : « J’ai eu un cours à option sur la littérature jeunesse. J’étais à l’époque enseignante itinérante pour la commune d’Oron-la-Ville, on me confiait des enfants en difficulté d’apprentissage avec la lecture et je me suis dit qu’on allait travailler avec les vrais livres de la vraie vie. J’ai eu un immense coup de cœur lors de cette formation. »

Après un parcours dans plusieurs institutions vaudoises, elle travaille aujourd’hui au Carré d’As à Romont, auprès d’enfants en situation de handicap. En tant qu’enseignante spécialisée, Stéphanie Baur-Kaeser a le privilège de pouvoir choisir sa méthode d’enseignement. Elle n’utilise que la littérature jeunesse : « quelle que soit la population, avec de la médiation, la littérature fonctionne avec tous les publics. »

Puis, le désir de partager ces moments au-delà des murs de sa classe et de façon plus large se fait sentir, d’où la création, en 2014, de « Loup-y-es-tu ? », un concept innovant proposant des stages de littérature jeunesse, chez elle, dans les structures accueillant des enfants ou encore dans son bus itinérant.. Cette activité lui permet des rencontres avec des populations différentes, que cela soit un public régulier, comme en bibliothèque ou en classe, ou auprès d’un public bien plus jeune : « Dernièrement, j’ai travaillé avec des bébés 9-18 mois, c’était un vrai challenge mais c’était fantastique. » L’investissement est important pour mettre en place ce type de rencontres, mais Stéphanie Baur-Kaeser avoue que c’est là qu’elle s’amuse le plus : « fabriquer des accessoires, des robes à histoire avec des poches secrètes, des valises avec des trucs qui s’ouvrent et des mécanismes, des décors. Cela donne un petit côté théâtral que j’aime bien. »

Un jour, elle visite un festival de littérature jeunesse et rencontre l’auteur Thomas Scotto, en train de faire des dédicaces auprès d’enfants qu’il avait rencontrés dans le cadre scolaire la veille. « Il avait une façon de s’adresser à eux, je trouvais ça génial. Il a été le premier auteur que j’ai invité pour « Loup-y-es-tu ? ». 4 auteurs sont venus durant 4 années successives, en collaboration avec l’établissement d’Oron-Palézieux. Stéphanie Baur-Kaeser prépare les enseignants et les classes, et observe ensuite depuis un coin de la classe, le jour J, la rencontre avec l’auteur. Après ces 4 années, l’idée du festival a germé. « On a un écrin (ndlr : la commune de Rue) juste merveilleux, j’avais envie d’y créer notre propre festival de livre jeunesse. » Sans plus connaître les autorités communales ou scolaires, ou encore la façon de monter ce genre d’événement, elle se lance. La commune approuve et l’appuie dans ce projet. Stéphanie Baur-Kaeser monte une association, crée le comité. Tout s’apprend sur le tas, et tout commence juste avant le COVID, fin 2019. « On était dans les tous premiers événements avec certificats COVID (ndlr : octobre 2021 pour la 1ère édition) – impossible de faire des ateliers pour enfants avec masques et distance. » De l’aide, elle en a eu beaucoup de la part de la commune – financièrement et logistiquement – mais également des restaurateurs de Rue et des sociétés locales : « Le restaurant a été d’accord de tenir la buvette du festival. Du côté de la crêperie, les murs nous ont été prêtés pour l’expo, ainsi que le caveau. L’US Rue a proposé à manger sur la place de l’école. » Les soutiens sont aussi – et surtout – venus du mécénat et du bénévolat. Car lors de ce festival, seuls les auteurs sont payés. Une masse de travail énorme est donc faite sur la base du travail volontaire. 40 bénévoles ont embarqué pour l’aventure de la première édition. Certains d’entre eux rempilent pour ce deuxième volet, d’autres seront encore recrutés d’ici le début du festival en octobre.

Pour l’organisation, le comité peut compter aussi sur le conseil des enfants : « Ce serait vraiment dommage de monter un événement qui leur est destiné sans leur demander leur avis. S’ils ne le donnent pas sur la programmation, ils le font en revanche sur les activités. Ils participent à la décoration des lieux, à la promotion de l’événement. Ils ont également participé au choix de l’affiche pour les deux éditions. »

Pour Stéphanie Baur-Kaeser, créer un tel festival sans impliquer les écoles n’a pas de sens. Et la demande scolaire est forte pour cette deuxième édition, avec la participation des classes du cercle ACER, de quelques classes d’Ursy, d’Oron-la-Ville, de Jorat-Mézières, du Carré d’As, de l’étage de pédiatrie au CHUV, du CO de Romont, entre autres. Dix auteurs et illustrateurs participeront à cette 2e édition, dans les classes le jeudi et le vendredi, puis jusqu’au dimanche 8 octobre à Rue.

Afin de ne pas épuiser tout le monde, et pour ne pas créer un sentiment d’habitude avec le public des écoles, le comité a fait le choix d’un festival tous les deux ans. Et malgré les déjà 2000 visiteurs de la première édition, il revendique le côté « artisanal ». Selon elle, le festival doit rester à taille humaine, pour que les gens continuent à y trouver du plaisir, visiteurs comme bénévoles.

Ses projets futurs ? « Peut-être faire plus fleurir Loup-y-es-tu, et trouver un équilibre en mes trois activités : l’enseignement, « Loup y es-tu ? » et « Les mots clés à molette ». Nulle envie ici de faire grandir le festival. Et quand on lui demande ce qui la motive et la fait continuer à s’investir autant dans tous les projets qu’elle entreprend et qui sont tous dédiés aux enfants, elle répond : « j’ai un mantra, que je me répète souvent : les livres et les mômes.»

 Virginie Barrelet

Infos :
Loup y es-tu
les mots cles amolette